Radio Tarifa
La noche
François Saddi
Près de 20 ans après leur séparation, 2 des musiciens fondateurs de ce groupe espagnol de musique du monde réalisent un nouvel album, hommage mémoriel à leur chanteur de l’époque Benjamín Escoriza disparu en 2012.
Radio Tarifa, ce fût une belle et féconde aventure musicale mêlant flamenco, rock et musiques médiévales. Les 2 piliers du groupe, l’espagnol Faín S. Dueñas et le français Vincent Molino se sont connus il y a 40 ans au sein du groupe Ars Antica Musicalis. Le chanteur de flamenco passionné de rock Benjamín Escoriza les rejoint au sein de cet ensemble quelques années plus tard. Ils fondent alors Radio Tarifa et sortent un premier album en 1993, Rumba Angelina. Suivront 3 albums dont un live en 2003. Ils se séparent en 2006 et le chanteur mènera ensuite une carrière solo jusqu’à sont décès en 2012.
Ce nouvel opus très varié enchaîne 14 titres dont 9 traditionnels (Espagne, Grèce, Bretagne), 1 pièce de musique ancienne et 4 compositions dont la 1ère qui ouvre le disque, "La noche" est signée pour le texte par Benjamín Escoriza et pour la musique de Faín S. Dueñas et Vincent Molino. Sur ce bel album, les 2 compères sont poly instrumentistes, le 1er, réalisateur de la plupart des arrangements est plutôt tourné vers les cordes tandis que le 2ème l’est vers les vents. Ils sont entourés de nombreux musiciens ; 9 instrumentistes et 8 chanteurs se relaient suivant les titres.
Pour ce qui est du chant, on peut entendre J. Castrillón (3 chts), B. Paloma et J. Gonzàlez (2chts), E. Parra, F. S. Dueñas, J.M. Cabral, M. Wildenhahn et V. Molino (1 cht chacun). Une belle diversité de timbres dominée nettement par les chanteurs flamenca. Pour ce qui est de l’instrumentation, on peut entendre, au fur et à mesure des titres violon, alto, violoncelle, ud, basse, piano, accordéon et gaïta, joués par A. Zahriou, H. Bitar, J. Ibiks, W. Sheik, JJ. Martinez, C.White, M. Trujillo, R. Amusategui et A. Brandes-Hargrove. Je ne peux résister à citer quelques perles de ce bel album outre "La noche" déjà citée : "Tarantos" au texte en forme de copla chantée par Javier Castrillon, "La niña del almendro viejo" chantée par Blanca Paloma, dont une partie de la mélodie est empruntée au folklore breton, ou encore le traditionnel grec "Sabah" chanté par Jose Gonzàlez.
On peut aussi entendre dans ce bel album très cohérents 4 titres quelque peu surprenants comme "Quel sol che raggia", composition du membre de l’Ars Nova florentine Francesco Landini (1325-1397), ou bien le traditionnel japonais "Sakura", peut-être la seule chanson japonaise, une berceuse, chantée dans toutes les écoles maternelles de l’hexagone, ou encore "Songe obscur" cet enchaînement poétique mené chanté par V. Molino reprenant des extraits de poèmes de B. Cendras, P. Fort et P. Verlaine, ou enfin "Digifonía", petite pièce curieuse toute parée d’électronique concluant le disque. Je me souviens avoir vus le groupe en concert autour des années 2000 dans cette magnifique salle qu’était l’Espace Prévert à Savigny le Temple (77). Un choc tant visuel que sonore, lunettes noires et électricité pour un flamenco flirtant sans vergogne avec le rock… Souhaitons leur de retrouver lors des concerts avec cette nouvelle formation tout ou partie de leur flamboyance passée !



