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Des mondes de musiques

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Jean-Pierre Leray

Le rêve réalisé d’un passionné

Interview réalisé par Philippe Krümm

Jean-Pierre Leray Photo DR

Jean-Pierre Leray est un personnage à part dans le monde de l’accordéon. Sa passion pour l’instrument à soufflet l’envahit dés son plus jeune âge. Malgré de gros ennuis de santé, notre homme, toujours accompagné d’Annick sa femme, a depuis 2015 concrétisé sa passion ultime. Le voilà seul maître à bord de la marque d’accordéons chromatiques : Fisart. (Mais l’aventure Fisart lui a couté son historique « Maison de l’accordéon » (distributrice exclusive de la mythique maison Italienne d’accordéons diatoniques de Recanati : Castagnari) qui a fermé définitivement ses portes en juin de cette année !

Rencontre avec un homme qui fait désormais partie de l’histoire de l’accordéon en France.

PK : L’accordéon te séduit à quel âge ?

JPL : 8 ans. C’est peut-être le premier instrument de musique que je vois et que j’entends. On était à la campagne en Bretagne, à Bourg-des-Comptes (35). C’était au mariage d’un de mes jeunes oncles. Il y avait un musicien, un routinier, qui y jouait. Je suis tombé totalement en extase. Au point, m’a-t-on raconté, que je n’ai rien mangé du repas de noce.

Après, je n’ai pas cessé de réclamer cet instrument à mes parents. Devant mon insistance et ma persévérance, ils m’ont acheté un jouet pour Noël. Par chance, il s’agissait d’un jouet de bonne qualité. Un Bontempi à clavier piano mais qui était jouable. Je pensais que cela allait se jouer tout seul. Bien sûr, ça n’était pas le cas. Alors je me suis vraiment mis à l’ouvrage.

Mon premier tube, c’était Le travail c’est la santé (rires). Ma mère, heureusement, a pensé que ce serait plus sérieux si je prenais des cours. Elle s’est adressée chez Duros, le gros magasin de musique de Rennes. Les vendeurs lui ont conseillé un professeur qui travaillait pour eux. C’est comme ça que je me suis retrouvé en cours collectif. Une année de solfège avant de commencer vraiment sur l’instrument… Avec un professeur qui attendait de voir le niveau et la passion pour faire acheter un accordéon. Lui, il ne courait pas après sa commission (sourire). D’après lui, j’avais plus d’aptitude pour le solfège que pour l’instrument lui-même. Au bout d’un an, j’ai donc eu mon premier “vrai” accordéon, un 4 rangs 80 basses, avec un tremolo assez léger. J’avais 12 ans.

PK : Comment découvres-tu l’accordage et la réparation ?

JPL : J’avais constaté une chose : on pouvait modifier le son, obtenir un son un peu américain, en enclenchant le registre à moitié. Donc pour comprendre ce qu’il se passait dans l’instrument, j’ai commencé a aller fouine un peu à l’intérieur.

PK : Et cela devient ton métier ?

JPL : À 19 ans, en 1976, après mon bac, je suis rentré dans un magasin généraliste de Rennes pour développer le rayon accordéon. Il y avait un vieux monsieur chez qui le magasin faisait faire ses réparations d’accordéons. Je lui portais l’instrument à réparer. C’est lui qui m’a conseillé de me mettre à la réparation et à l’accordage. Il avait eu un important magasin de musique dans l’Ouest de la France : Richard Accordéon. Crucianelli et Cavagnolo étaient les deux marques principales de l’époque. Un jour, le commercial de Crucianelli a proposé à mon patron que je vienne faire un stage avec le chef de l’accordage de chez Cavagnolo qui venait travailler maintenant chez eux.

Je suis donc parti me former d’abord sur de petites périodes, puis des sessions de plusieurs mois. Des le début, j’ai accroché. C’était au moment du revival du diatonique en France. La grande période où il partait plus de mille cinq cents Hohner 2915 en Bretagne. Le chromatique était, lui, un peu en déclin. Et me retrouvant avec des diatoniques, j’ai juste appliqué ce que j’avais appris sur le chromatique au diatonique. La grande mode était d’assécher les accordages. J’en fais vraiment beaucoup. Puis on a changé les musiques pour des musiques italiennes.

Sandro Castagnari, Riccardo Tesi, Massimo Castagnari, David Munelly, Markku Lepistö.

PK : Ta rencontre avec Castagnari fut décisive ?

JPL : Oui. La Maison de l’accordéon à Rennes a été créée 1983. J’avais rencontré Marc Perrone en 1982, à l’occasion d’un stage à Rennes organisé par les Éclaireurs de France. J’étais très motivé. J’avais déjà appris l’italien en prévision. L’Italie était la langue de l’accordéon. Les Éclaireurs avaient demandé à mon patron d’avoir en dépôt deux ou trois modèles 2915. Il avait refusé dans un premier temps. « Si vous ne le prêtez pas, ce sera les autres magasins qui le feront » : je l’ai convaincu et il a accepté. J’avais préparé les accordéons avec de beaux accords.

Marc Perrone photo DR

Devant Marc Perrone, j’étais dans mes petits souliers. Il a essayé un accordéon. Il a aimé. Il n’avait pas le temps pendant le stage mais le lendemain je l’ai invité à déjeuner dans une pizza pas terrible (sourire). Après, j’ai également croisé Riccardo Tesi qui était lui aussi passé à Rennes. Lors d’un de ses concerts, il avait demandé si quelqu’un pouvait traduire. J’avais levé la main. C’est avec eux que j’ai découverts les accordéons italiens et Castagnari. À l’époque, ceux de Marc étaient entretenus par Helmut Hohner, l’historique et important réparateur de la maison Hohner (même nom mais rien à voir avec la famille de la firme allemande, NDLR). À cette période, j’ai décidé de lancer ma propre entreprise.

C’est parti grâce au diatonique, même si je faisais aussi des chromatiques.

J’avais un petit contrat d’exclusivité avec le papa, Mario Castagnari. Il en avait vendu cinq en Bretagne. Dans mon premier contrat on est parti sur vingt-cinq ventes annuelles. Mais cette première année, j’en ai vendu soixante-quinze ! Les gens venaient de partout de Paris, d’Auvergne et du Nord. Après, j’ai eu l’exclusivité sur la France. Et avec l’arrivée des enfants Castagnari, ils ont produit beaucoup plus. J’avais aussi la clientèle du chromatique que j’avais connu dans le magasin précédent.

David Venitucci photo DR

PK : On passe les années et on arrive à l’aventure Fisart.

JPL : On faisait le diatonique et l’accordéon pour le bal, et les basses chromatique pour le concert. Dès 1986, j’ai toujours cru que l’accordéon rentrerait dans les conservatoires, avec l’accordéon à convertisseur qui était le modèle plus complet.

J’avais fait une formation musicale avec un professeur dans la région de Dinan qui m’avait initié au classique. Et je croyais fermement à son avenir.

Bon, on était à Rennes. Toujours comme partout en France sur les gros problèmes des commissions, le prof avait 20 %, plus des retro commissions. On a lutté contre cela.

Il n’est resté avec nous que les professeurs valables, aimant la musique. On a travaillé avec les écoles de musiques. On avait le Scola fait par Castagnari un beau petit modèle pour enfant. Nous avions aussi des modèles plus importants. Mais Castagnari sous-traitait beaucoup. On travaillait avec Bugari et puis Pigini. J’étais déjà ami avec Massimo Pigini. Donc on a travaillé avec eux mais j’avais beaucoup de demandes. Peut-être que je ne me trouvais pas assez écouté. J’avais beaucoup d’idées.

Puis j’ai eu mon grave accident. Je ne suis pas passé très loin de la mort. En repartant, j’ai eu envie de faire exactement ce que je voulais : mettre toutes mes idées en fabrication. C’est comme ça que, après avoir rencontré beaucoup de dirigeants de marques, j’ai décidé de travailler avec Fisart. Parce que, entre autres, leurs mécaniques pour basses chromatique étaient pour moi les meilleures. Ils avaient été très à l’écoute, avec une envie de développer la marque en France. On était en 2003. On a beaucoup travaillé sur la mise en place dans les conservatoires. On a fait beaucoup de rencontres avec des professeurs. Mais à un moment, j’ai trouvé que la finition n’était plus là. Il fallait revoir beaucoup de choses.

La fabrication d'un Fisart à Castelfidardo Photo DR

La maison Fisart est en fait une sorte de conglomérat d’artisans, comme c’est souvent le cas en Italie, avec chacun sa spécialité. Les caisses, les claviers main gauche, les claviers main droite, les soufflets, la peinture, la finition pour chacune de ces tâches : un sacré atelier ! Mais là, c’était trop disparate. Quand on m’a proposé d’acheter la marque, j’étais plus présent dans l’évolution de la marque. Je tombais un peu à pique. La maison n’allant financièrement pas au mieux, j’ai donc repris la marque et les encours de fabrication, en montant une société avec mon petit frère qui a osé se lancer dans un projet original. Lui, il venait de la voiture, les garages. On a créé Fisart France le 17 juillet 2015.

PK : Tu prenais de gros risques. Et tu t’attelais à beaucoup de travail et de lourdes responsabilités ?

JPL : Oui. Mais ça ne fait pas peur car je connais assez bien le secteur, même si la période n’est pas fleurissante. J’ai donc repris mais en restructurant la fabrication et en apportant de la rigueur, des innovations et la qualité.

Didier Ithursarry, photo Vicky Michaud

Il y aura toujours des choses à améliorer. Quand je me rends à Castelfidardo, j’y passe plusieurs jours par mois. Je travaille sur l’amélioration des modèles, comme en ce moment le bruit des claviers main droite. À chaque déplacement, je progresse sur les matériaux, la technique, la finition, les techniques de montage, la qualité des musiques… J’ai une bonne équipe. Fisart France se trouve à l’étage de la maison de l’accordéon, dans le même bâtiment, mais pas les mêmes locaux.

Ludovic, depuis vingt-cinq ans avec nous, est devenu notre auto entrepreneur. Il prépare les accordéons Fisart.

 

Ludovic Beier photo Raphael Rinaldi

La production du son, les techniques de montage… C’est un travail d’équipe. Comme avec l’accordeur avec qui on a découvert qu’avec différentes techniques de montage on améliore le son, comme avec l’évolution des sommiers. On travaille même sur un jeu de musique spécial pour Vincent Peirani. Ce sont des expériences. On ne gagne pas à tous les coups mais on avance. Nos modèles s’améliorent chaque mois. Aujourd’hui, on réfléchit et avance sur tous les modèles grâce a des musiciens comme Marc Berthoumieux , Ludovic Beier, David Venitucci, Didier Ithursarry, etc.

Vincent Peirani , Photo DR

En Italie, grâce à Nando Beltuna, j’ai trouvé une maison pour la finition générale de l’instrument. Il s'agit de Fismen. Ils sont une douzaine de personnes. Je me suis tout de suite bien entendu avec eux. Ce sont des artisans comme j’aime, des amoureux du détail. Ça fait un an que je travaille avec eux et nos accordéons sont vraiment de plus en plus beaux. Avec eux, j’ai donc un local, des belles fabrications en cours. Et mon bureau. Un rêve. Quand j’arrive à Castelfidardo, je suis chez moi.

PK : Il y a donc toujours des choses à découvrir ?

JPL : Oh, ça oui. Comme réduire la taille du 3 voix. Nous avons vingt-six modèles différents dans la marque avec les touches piano. La passion est toujours là et le travail à l’amélioration avec les musiciens reste mon moteur. On reste des artisans. On ne vendra jamais trois mille cinq cents accordéons par an comme le faisait Crucianelli en France dans les grandes années. Mais on est connu. Beaucoup d’artistes nous font confiance.

Les musiciens aiment nos instruments. Maintenant, il faut développer la distribution. On avance sur beaucoup de territoire. En ce moment, la Suisse commence bien. En France, c’est plus difficile. Tout reste à faire pour notre nouvelle belle marque.

 

Dernières nouvelles : La maison Fisart reste également, mais plus de manière exclusive, distributrice de Castagnari.

 

Modèle Music'hall Spécial Plus.

 

Modèle Harmony imitation cerisier

Modèle Osmose Piastra

Tous les modèles sur le site : www.fisart.fr

Rencontrez Jean pierre Leray , les accordéons Fisart et Castagnary au 4ème Salon de l’Accordéon à la Bellevilloise les 7 et 8 Octobre 2017.

 

FISART FRANCE Sarl
37 rue Yves Noël
35200 - RENNES - FR

P: +33 (0) 684 951 328

e-mail:
info@fisart.fr