Charles Quimbert
Une voix Bretonne en terres Québécoises
Philippe Krümm
Dès les premières éditions de Chants de Vielles aujourd’hui à Saint-Antoine-de-Richelieu, Charles Quimbert fut de la belle aventure musicale. Brève présentation de l’artiste puis il nous évoque des souvenirs de ses passages à Chants de Vielles.
Né en 1958 à Sel-de-Bretagne, en Ile-et-Villaine, Charles Quimbert fait partie de cette génération marquée par la renaissance de la culture bretonne des années 70. En compagnie des chanteurs Roland Brou et Mathieu Hamon, il enregistre plusieurs albums (Trois p’tits oiseaux l’y a, Pour réjouir la compagnie...). Il est également clarinettiste au sein de la formation Les 6 Troncs. C’est vous dire que l’homme ne manque pas d’humour. En 2011, il collabore avec la chanteuse et violoncelliste Gaëlle Branthomme pour l’album : J’entends la Seraine. Il s’est produit aux aux festival des Vieilles Charrues, aux Tombées de la nuit et sur de nombreuses scènes à l’étranger. Il est membre fondateur de la Fête du Chant Traditionnel à Bovel.
Combien de fois as-tu chanté à Chants de Vielles ?
Je n’ai pas compté. Je suis venu régulièrement depuis les premières éditions, un peu moins ces dernières années. Pourtant comme joueur de vielle je suis assez méconnu (Rires).
Bien évidemment, je suis invité comme chanteur, parce que dans Chants de Vielles, il ne faut jamais oublier qu’il y a le mot Chants. Geneviève Nadeau, la directrice du festival, je l’ai connue il y a plus de 20 ans, avant qu’elle vienne en Bretagne faire un stage et ensuite travailler à Quimper, donc on avait continué de se voir. J’habitais au sud Bretagne à l'époque. Il y a eu pas mal de Québécois qui sont passés dont Robert Bouthillier. Grace à eux j'ai découvert le réseau québécois.
Charles Quimbert en animation dans l'église de Calixa-la-Vallée - Photo DR
J’y suis allé dès la seconde édition. Je suis venu comme moniteur de stage de Chant, à la suite, presque chaque année, j’étais là. J'ai suivi toute l'évolution du festival. Ce sont des spectacles aux rythmes nord-américain, tu fais 20 minutes à un endroit, 20 minutes à un autre. J’y suis allé souvent tout seul, mais également avec une violoncelliste, Gaëlle Branthomme, qui habitait au Québec et on a participé plusieurs fois avec le trio : Brou- Hamon-Quimbert. J’ai pratiqué de nombreuses formules, mais je revendique d’être « un artiste, ami du festival ».
C'est vraiment fabuleux comme terrain de jeu. Le chant francophone est hyper présent. Évidemment, ils sont amoureux de tout ce que l’on peut amener. De mon côté, c’est pareil. J'ai un regard passionné vers tout ce qu'ils chantent, leurs façons de faire. Je trouve ça, vraiment très enrichissant, c'est un vrai échange. J’aime participer avec les oreilles et les yeux. Ce que je trouve bien à Chants de Vielles, c'est ce ton franco-québécois, le respect qu'ils ont par rapport à cet intergénérationnalité, c'est vraiment une valeur partagée.
Jean-Paul Guimond et ses os - Photo DR
Par exemple, le respect qu'ils ont pour Jean-Paul Guimond (Chanteur né en 1933 dans les Cantons de l’Est) Je l’ai découvert à Chants de Vielles, c'est un personnage extraordinaire. Il n'arrête pas de chanter. Il se couche le dernier et se lève le premier. À l'époque, il avait sa fiole de gin dans la poche. C’est un passionné de chant avec un répertoire sans limites, comme on en trouve sur le terrain en Bretagne aussi, mais lui il a vraiment quelque chose en plus. Dans ce festival il a toute sa place. (Aujourd’hui la grande scène porte son nom. Ndlr). Il vient tous les ans. Il s’assoit au même endroit. Il a sa place. Il est reconnu...Et il chante. Une année, j'étais venu à Chants de Vielles avec André Drumel, c’était un chanteur, aussi brillant en breton qu’en français. Il venait animer le stage de chant. Il avait sensiblement le même âge de Jean-Paul. Il ne se connaissait évidemment pas. Le festival était encore à Calixa-la-Vallée. Ils se sont assis autour d’une table en début d'après-midi. Ils ont chanté toute l'après-midi assis là. Un coup l’un, un coup l'autre, et petit à petit, il y a eu un cercle de personnes autour d'eux, qui écoutaient, et cela c’est terminé avec une foule d’eux. C'était informel et absolument magnifique. Ce sont de belles rencontres qui ne sont pas au programme, mais qui sont tout à fait dans l'esprit de ce festival.
Il y a beaucoup d’autres personnes incontournables, comme le groupe Hommage aux Aînés par exemple, fabuleux, d’une grande humanité et avec un immense répertoire. Ce sont des gens extraordinaires avec un côté artistique, ce sont des gens de scènes.
Michel Faubert - Photo P.Krümm
Et il y a évidemment Michel Faubert, un personnage, un conteur-chanteur ou le contraire. C'est le « grand frère » de Geneviève Nadeau et Nicolas Boulerice eC'est leur référence. Ils en ont certainement plein d’autres, mais lui c'est un grand frère de cœur. Pour moi Michel Faubert fut aussi une sacrée rencontre, grâce au festival, parce qu'il a du recul, du savoir, de la profondeur poétique, et ce regard particulier... Ça pose tout l'ensemble. Ce sont des belles références.
Ce que je trouve merveilleux à Chants de Vielles aussi, c'est le fait que ce soit organisé par des musiciens, ça c'est très rare. On a l'habitude de voir les groupes comme le Vent du Nord, sillonner le monde. Partout où ils passent, on leur déroule le tapis rouge... Et là à Chants de Vielles, c'est eux les organisateurs, c’est eux qui accueillent les musiciens. Je trouve que ça donne une profondeur.
Je suis toujours émerveillé de voir une partie des organisateurs se balader dans leurs voiturettes de golf, avec leurs talkies-walkies : Tu vois Nicolas Boulerice, Olivier Demers, Réjean Brunet, qui sont en train de donner des consignes...de faire vivre le festival tout en étant toujours disponibles, présents, avec le sourire. et le soir tu les retrouves sur la grande scène, comme s’ils n’avaient rien fait de la journée.
Il y a aussi bien évidement Geneviève Nadeau qui papillonne partout, C'est une activiste incroyable. Par leur rayonnement international, avec le groupe le Vent du Nord, ils font une programmation qui est très originale pour les festivals francophones d'Amérique du Nord.
Si tu compares à Mémoires et Racines... Mémoires et Racines, c'est très bien, mais ce n’est pas du tout la même philosophie, leur axe de travail est principalement centré sur la musique québécoise ou franco-québécoise, ils font voir tout ce qui se fait autour de ces musiques-là.
Alors qu’a Chants de Vielles, c'est vraiment, comme je te le disais intergénérationnel, mais aussi international. Tu as des groupes qui vont venir de Norvège, d’Amériques qui vont rencontrer les francophones du Québec
Pour la programmation ils puisent dans leurs connaissances, et dans les relations qu'ils ont tissées. C'est vraiment intéressant. Et puis, autre aspect aussi, finalement, même pour la francophonie : l’Auvergne, la région centre est représentée comme la Bretagne. Finalement, c'est assez rare de voir sur un même festival une diversité francophone comme ça.
L'Auvergne-Berry est souvent là parce que les grands joueurs de Vielle sont plutôt dans ces régions, même s'il y en a partout en France.
Une dernière anecdote ?
Oui ! Jouer dans un pays étranger c’est toujours bien pour rencontrer des musiciens français (rires).
On avait fait une sorte de création à faire, sur place, avec Gilles Chabenat qui dirigeait un stage au festival.
Je pense que c'est un des meilleurs accompagnateurs et en plus à la vielle. Il s'est tellement confronté à plein de chanteurs et de chanteuses...Il a même fait du blues...C'est vraiment un accompagnateur qui sait se mettre au service d’un autre artiste. Je n’ai jamais vu une paire d'yeux me regarder comme ça. Quand tu chantes et que le gars t'accompagne, il a un regard absolu, il sait tout ce qui va se passer. C'est incroyable.
Daniela Heiderich & Gilles Chabenat – Photo DR
Ton actualité ?
J’ai deux projets sur le feu, on va dire. J'ai un concert thématique autour de l'eau « Le son de l'eau. », avec François Chapron, contrebassiste. C’est passionnant, je veux toujours chanter des choses que je connais, et la thématique de l'eau, c'est fantastique, parce que ça m’évoque plein de choses.
Et le public, tout de suite, il accroche, qu'ils soient d’ici ou d'ailleurs et j’aime ça.
Et un nouveau disque ?
Oui sur les rondes. Il est sorti le 15 mai de cette année.
CD Charles QUIMBERT et Roland BROU - Rondes chantées de Haute Bretagne
« Roland Brou et Charles Quimbert reviennent à leurs premières amours avec ce CD consacré à la danse en rond. Des tours, des ridées, des bals et des ronds… Du répertoire traditionnel mais totalement original. Le tout enregistré en situation avec les pas des danseurs rythmant les voix nues. Un disque qui fait bouger les pieds et nous entraine dans les danses du répertoire chanté de Haute Bretagne. »